Grossesse Parentalité Post partum

POST PARTUM : L’ENVERS DU DECOR

Dans la vie, j’ai été plein de personnes, j’ai joué plein de rôles, j’ai occupé plein de statuts. J’ai été écolière, j’ai été comédienne, j’ai été musicienne, j’ai été salariée, j’ai été chef d’entreprise, j’ai été étudiante. Autant de fonctions qui ont changé, évolué, disparu avec le temps, avec la vie, avec les envies.

 

Depuis bientôt deux mois, je suis maman. Et pour la toute première fois de ma vie, cette nouvelle étiquette, ni le temps, ni la vie, ni les envies ne me l’enlèveront. Je suis maman pour toujours. Est-ce que je sais vraiment ce que ce nouveau rôle implique ? Après seulement 8 semaines ? Je ne pense pas, non. Être maman d’un nouveau-né, c’est un travail à la chaîne, c’est l’usine, mais avec de l’amour. L’usine de l’amour, ouais. C’est un job axé sur l’aspect technique. Changer des couches, faire des biberons, donner le bain, trier les vêtements. Plein de petites choses que l’on répète en boucle, qu’on ne savait pas faire il y a un mois et qu’on fait désormais naturellement, instinctivement, avec le sourire. Moi j’aime chaque seconde de ce travail à la chaîne. Même la nuit, je grogne un peu mais bordel, j’aime toutes les secondes magiques à ses côtés. C’est comme ça que je surmonte la fatigue, le manque de temps, le teint blafard, les cernes et les cheveux gras : en semant un peu de magie partout où je peux.

 

Ma petite perruche a bientôt deux mois et après vous avoir raconté mon accouchement, c’était important pour moi de revenir sur ces premières semaines de notre vie à 3. J’hésitais à écrire deux articles séparés, pour aborder le post-partum au niveau physique d’une part, et ma vie de maman d’autre part. Et puis en fait, non. Après tout, je vis ces deux expériences de manière simultanée et elles s’équilibrent entre elles, alors autant écrire un seul article. Je n’avais même pas forcément envie de parler du post-partum au niveau corporel mais je pense que c’est important que je le fasse aussi. J’ai l’impression qu’en tant que nouvelle maman, j’ai cette mission forte : celle de prévenir les futures mères. Pas pour faire peur, non, au contraire. Juste pour dire « hey, ne t’inquiète pas si ceci ou cela t’arrive, c’est normal ». Je trouve qu’on ne parle pas assez du post-partum. Je comprends pourquoi, en fait. Moi-même, j’en parle très peu. J’ai envie de renvoyer des ondes positives et de me concentrer sur mon bonheur, sur les petits sourires aux anges, sur l’odeur du savon pour bébé et sur les mini cuisses toutes potelées. Mais ici, sur mon blog, vous le savez, je parle à cœur ouvert et je vous raconte toujours tout, sans enjoliver mais sans minimiser non plus. Il y a eu des moments difficiles, c’est sûr, il y en aura d’autres. J’ai décidé qu’ils ne prendraient pas le dessus sur le reste parce que sérieux (ATTENTION je vais dire un truc super cliché), la vie est trop courte et trop fragile pour passer ses journées à chialer sur un bouton de jean qui ne ferme pas. C’est facile à dire, je sais. Perso, j’ai complètement éludé le problème : je porte plus de jean. Un problème = une solution. Bref, le sujet, c’est pas de parler de jean. Je voulais juste introduire le sujet, l’intro fait déjà une page. ALLEZ ON SE RECONCENTRE LÀ, je me lance. Bonne lecture les gars !

 

Les trois premiers jours à la maternité

 

Les gars, avec Patrick, on a pas mal voyagé ces dernières années. De Bangkok à Mykonos en passant par Marrakech et Dubai, j’ai pas mal traîné ma couenne par monts et par vaux dans des hôtels plutôt pas dégueulasses. Mais figurez-vous que l’endroit où j’ai passé les plus jolies vacances de ma vie, ba c’était la chambre 4 de la maternité de Mâcon. Oui, oui, une chambre sans tapis de bain, sans paroi de douche, avec un lit de très petite largeur et une fenêtre qui ne s’ouvre pas.

 

On n’est pas bien quelque part, les gars, on est bien avec quelqu’un.

 

Je vous ai déjà raconté dans mon article sur mon accouchement comment s’est passée ma première soirée dans la chambre, un peu dans le flou, un peu dans le doute.

 

Le premier soir, quand tout le monde est parti, je me suis enfin retrouvée dans ma bulle, avec mon bébé, avec des dizaines de messages de félicitations et d’amour. J’ai clairement regretté de pas pouvoir me faire livrer des burritos ou un couscous pour manger devant Capital, comme on fait le dimanche soir, quoi. Mais bon, c’est un détail. Mon bébé dormait, je savais pas trop quoi faire, alors j’ai ouvert mon ordi et j’ai bossé. Comme un dimanche soir, comme tous les soirs. Besoin de m’accrocher à un élément de ma routine, à quelque chose que je connais, peut-être. J’ai travaillé longtemps, Basile dormait, j’ai fini par sombrer sous ma couette (enfin, si seulement y avait des couettes, on est pas dans un riad 5 étoiles à Marrakech hein…) (bon, t’as pas besoin de mettre de couette à Marrakech mais bon). Pardon, j’ai fini par sombrer sous mon drap de lit d’hôpital et sous ma couverture jaune qui gratte (d’où la nécessité du drap)(intelligents les gars)(t’as pas que des chirurgiens de folie hein, t’as aussi des supers as de la déco à l’hosto !). Vers 3 heures du matin, les pleurs de ma petite perruche me fendaient le cœur et je ne savais pas du tout quoi faire de cette petite personne. Pourquoi pleures-tu ? Quelles sont tes revendications ? Que puis-je faire pour alléger ta souffrance ? J’EN SAIS RIEN MOI DIS-DONC ! C’est un peu comme si on te balançait sur un nouveau poste au travail sans t’avoir formée avant, quoi. Heureusement, à la maternité, il y a ce bouton magique pour appeler OSEKOOOOUR. J’ai appuyé sur le bouton magique, des bonnes fées sont apparues. Elles m’ont proposé d’emmener ma petite perruche un peu avec elles pour que je puisse me reposer quelques heures. J’étais pleine de bons principes avant de rentrer à la maternité. AH NON MAIS MOI JAMAIS JE LAISSE MON GOSSE À LA NURSERIE, JE COMPRENDS MÊME PAS COMMENT ON PEUT FAIRE ÇA BLABLABLABLA. Et bien je peux vous dire qu’après 40 heures sans sommeil, tu te fous tes principes au cul et tu abdiques. Juste pour quelques heures.

 

Et vous savez quoi ? Le lendemain matin, à 6 heures, quand on m’a ramené mon bébé dans ma chambre, dans son petit lit et tout emmailloté dans sa couverture jaune (ouais la couverture jaune c’est vraiment le fil rouge de notre séjour) (couverture jaune…fil rouge…couverture JAUNE…fil ROUGE…T’AS COMPRIS ?) (pardon), bah mon petit cœur a fondu tellement fort, un peu comme le cœur caramel d’un moelleux au chocolat à peine cuit (oui, Patrick, tu fais toujours trop cuire tes moelleux, j’en profite pour te le dire). Je garde des souvenirs vraiment magiques de nos petites retrouvailles à l’aube, quand le soleil n’est pas encore levé et que mon plateau déjeuner n’est pas encore servi. Quand personne n’est témoin de ces petites minutes rien que tous les deux, en dehors du temps, en dehors du monde.

 

Je me rends compte que je pourrais écrire un roman complet sur mes trois premiers jours. Je m’étais souvent imaginé à quoi ressembleraient ces premiers instants, à quoi ressembleraient les premières rencontres. Tout était magique comme dans mon esprit. Bon, à quelques détails près. Dans mon esprit, j’avais pas pensé aux hémorroïdes, par exemple. Voilà. Je garde des merveilleux souvenirs de mes amis, de ma famille, de la famille de Patrick et de leurs yeux qui brillent en découvrant pour la première fois notre petit amour, issu de notre grand amour. Je garde des merveilleux souvenirs de toute l’équipe médicale. Je garde des merveilleux souvenirs des plateaux repas (LOL) (faut leur dire aux cuistots de l’hosto que le poulet ne se mange pas saignant). Je garde des beaux souvenirs de tout, vraiment. Mais dans le lot, je garde aussi une image assez nette de moi qui explique à mes visiteurs que si je peux pas m’asseoir et que si je boîte, c’est parce que, J’AI MAL AU CUL. Dans ces instants, tu abandonnes ta dignité, vraiment. Genre tu la déposes à l’entrée de la chambre et t’appelles DHL ou TNT pour qu’ils viennent l’emmener avec eux, très loin.

 

La maternité, c’était aussi l’occasion de recevoir ma formation de maman. C’est assez fou quand même parce que bon, j’ai trente ans, dans la vie j’ai quand même un peu roulé ma bosse les gars, hein. J’en ai gardé du marmot. Fille au pair, babysitter du samedi soir, sortie d’école…les gamins, ça me connaît. Et puis dans la vie, j’ai aussi fait tout un tas de trucs. Je bosse depuis douze ans, je suis partie de chez mes parents à 17 ans, j’ai monté une entreprise, j’ai travaillé sur des tas de projets, j’ai appris à lire à 4 ans, BREF, j’arrive à survivre en toute autonomie depuis pas mal de temps. Et puis là, voilà qu’avec un tout petit bébé de quelques heures, et bah je me retrouve totalement démunie comme si mon cerveau n’était plus capable de réfléchir. « Je sais pas faire ». T’as tellement l’impression qu’il y a une méthode universelle et que Dieu va te foudroyer sur place si tu fais mal les choses, que tu t’en remets entièrement aux auxiliaires de puériculture, sans réfléchir une seule seconde. Heureusement qu’elles étaient là, leurs conseils ont été précieux pour aborder ces premiers jours de mon nouveau job de maman. Mais sérieux, j’aurais pu aussi faire fonctionner mes neurones par moments. Je veux dire, pour changer une couche, y a quand même pas besoin d’avoir fait Sciences Po. J’ai regardé les auxiliaires le faire plusieurs fois avant de me lancer moi-même. Et puis au moment où je l’ai fait, je n’ai pas pu m’empêcher de poser dix milliards de questions et d’appliquer le protocole à la lettre, comme si je passais mon bac. En vrai, j’arrive à me torcher depuis 27 ans alors j’imagine que mon instinct est suffisant pour changer la couche de mon fils. C’est un peu comme quand tu passes le permis. Au début tu fais tout bien. Tu regardes si les passagers sont attachés, tu exagères les angles morts, tu règles ton rétro dès que tu montes dans ta voiture. Puis au fil du temps, tu passes au feu orange, tu grilles les priorités et tu fais des queues de poisson. C’est un peu pareil avec un bébé.

 

Dans ma petite bulle à la maternité, j’étais si bien. Tellement remplie d’amour et tellement protégée. La vie réelle me semblait si loin. Pas si loin, pourtant. Elle m’a bien vite rattrapée, cette bâtarde.

 

Au secours j’ai le baby blues !

 

On en entend beaucoup parler mais c’est un peu comme le monstre du LochNess, on a tendance à se dire que c’est une légende urbaine. En tout cas, moi, je ne pensais vraiment pas que ça m’arriverait. Je suis forte, moi. C’est ce que je me disais. Puis sérieux, comment je pourrais déprimer ou broyer du noir alors que j’ai mis au monde une petite merveille, que je suis entourée par des proches merveilleux, que super Patrick est un super Papa ? Je suis la plus heureuse, tout simplement. Ouais les gars, mais bon, on est pas des machines. L’euphorie est tellement haute pendant l’accouchement, pendant les premiers moments avec bébé, pendant les premières rencontres. À un moment tout retombe. Ça commence le troisième jour, pour moi. J’en parlerai peut-être plus longuement dans un autre article de ce sujet, mais à ce moment-là, j’étais contrariée car je n’arrivais pas à allaiter. J’ai commencé à pleurer dès qu’on abordait le sujet. Et à partir du moment où j’ai ouvert les vannes, je me suis sentie submergée par une vague de tristesse infinie. Genre la vague que tu prends en pleine gueule quand t’es au milieu de la mer et que t’as pas le temps de rejoindre le rivage, quoi. La vague qui te fait bien boire la tasse. Ça a duré plusieurs heures, ce jour-là. Et puis, après avoir passé plusieurs jours à enchaîner les visites, les messages, les appels, ce jour-là, d’un coup, était bien plus calme. Il ressemblait à la vraie vie, celle qui m’attendait en rentrant à la maison. Ça aussi, c’était un sujet qui me contrariait. C’est pas facile de se jeter à nouveau dans le quotidien, après avoir vécu des jours si forts, si intenses, si merveilleux. C’est pas facile de reprendre le cours de sa vie. D’ailleurs, c’est quoi mon cours ? Je ne le connais pas encore. Je ne sais pas encore à quoi va ressembler le cours de ma vie. Toutes ces craintes, toutes ces angoisses, d’habitude, dans la vie, je les balaie. PAS LE TIME. C’est vrai, c’est un peu mon truc ça au quotidien. Je ne me laisse jamais envahir par les pensées négatives, pas parce que je suis plus forte que tout le monde, non, juste parce que je ne me laisse jamais le temps de sombrer. J’ai toujours autre chose à faire pour m’occuper l’esprit. Je vis à mille à l’heure dans mon cerveau et il n’y a jamais une seconde pour un verre à moitié vide. À la maternité, j’avais décidé de faire un break, de prendre du temps pour moi, pour nous. Avoir du temps + des hormones + la fatigue + les angoisses = PAIE TON BABYBLUES MEUF.

 

Retour à la maison…

 

Nous étions entrés à la maternité dans la nuit de samedi à dimanche. Nous sommes repartis le jeudi en fin de matinée. « Vous voulez votre plateau repas avant de partir ? » OH BA OUI PUIS TU M’EN FERAS UN À EMPORTER AUSSI HEIN. Au cas où je suis en manque de purée Mousseline, sait-on jamais. Voilà, déjà, rien que pour ça, j’étais heureuse de rentrer. De retrouver les petits plats de Patrick, les petites bouffes entre copains.

 

Quand je suis rentrée, ça a été la panique totale dans ma tête, très rapidement. Les premières heures, c’était chouette. Manger devant la TV avec notre bébé, faire une sieste tous les 3. En fait, faire tout ce qu’on avait l’habitude de faire à deux, mais à trois. Mais une fois passée l’euphorie des retrouvailles avec notre maison et notre vie, je me suis rapidement sentie vide, inutile, décontenancée. C’était si bizarre de ne plus être enceinte. La dernière fois que j’étais assise sur cette chaise, j’étais enceinte. La dernière fois que j’ai ouvert le frigo, j’étais enceinte. La dernière fois que… Voilà, dans ma tête, c’était la pagaille. Au moindre truc que je faisais, je dressais le parallèle avec avant, quand j’étais enceinte. C’était tellement mieux. Je me sentais comblée, complète, épanouie, entière. Et là d’un coup, plus rien. Plus aucune action n’avait d’intérêt. J’étais heureuse d’avoir mon bébé, oui. Mais le reste de ma vie, soudainement, n’avait plus aucun sens.  Je me mettais à pleurer sans raison, comme ça, au milieu d’une phrase. Enfin, j’avais mille raisons dans ma tête.

 

Alors voilà, c’est ça le baby blues. Être submergée, de manière totalement irrationnelle, par une vague de tristesse, de mélancolie. Incontrôlable. J’avais beau savoir que tout était parfait dans ma vie, rien n’y faisait. Comment de temps cela allait-il durer ? Un jour, deux jours, plusieurs semaines, plusieurs mois ? J’avais l’impression que c’était ça, la nouvelle moi. Une meuf qui se sent vide. C’est comme fou d’avoir fait tout ce chemin en 9 mois pour en arriver à ça, quatre jours après l’accouchement. Le pire, c’est que je savais que ça pouvait arriver, hein. Mais pas à moi, non, forcément. Moi les trucs nazs, je suis toujours persuadée que ça n’arrive qu’aux autres. Je pleure beaucoup dans la vie car je suis très émotive mais je pleure pour des choses bêtes. Genre je pleure devant Super Nanny, je pleure quand je m’engueule avec Patrick parce qu’il y a plus de farine, je pleure quand je croise un lapin mort sur la route. Voilà, j’ai la larme facile mais pour les petits trucs du quotidien. Je suis jamais vraiment triste, jamais déprimée, jamais pessimiste sur ma vie. Donc pourquoi là, en rentrant de la maternité avec un magnifique bébé et une valise pleine de cadeaux, POURQUOI JE SERAIS TRISTE ? BORDEL ! Bon, tout ce blabla, finalement, c’est juste pour dire que le baby blues, bah les gars, c’est pour tout le monde. Le baby blues, il fait pas de discrimination positive ou négative, il s’en cogne, il touche qui il veut, en fait. Moi, il m’a touchée, il m’a frappée, il m’a surprise. Et puis dans tous les cas, t’as beau être prévenue que ça peut t’arriver, ça t’aide pas pour autant à mieux l’appréhender. Je veux dire, c’est comme le train fantôme, vous savez (la meuf tient vraiment VRAIMENT très fort aux métaphores sur les parcs d’attraction dans tous ses articles…). Le train fantôme, tu t’attends à avoir peur et puis surtout tu sais que c’est pour de faux, donc on pourrait se dire qu’au final, t’as moins peur. Et bah non. Moi dans le train fantôme je gueule quand même comme une truie qu’on égorge, dès que t’as un truc qui me caresse l’épaule. Voilà, le baby blues, tu sais que ça peut arriver, tu sais que c’est pour de faux, que c’est pas de la vraie tristesse, que c’est juste les hormones…ça change rien au fait que c’est dur à gérer. J’ai eu de la chance, mon baby blues n’a pas fait long feu. Un petit baby blues tranquille, un petit baby blues des familles pendant deux / trois jours. Rien d’alarmant. La sage-femme m’a d’ailleurs rassurée en me disant que c’était normal de pleurer et de remettre toute sa vie en question pendant quelques jours. En revanche, si ça continue plus longtemps, elle m’a bien dit qu’il fallait surtout pas laisser traîner. Heureusement, c’est parti comme c’est arrivé. Par la grande porte. Merci, aurevoir, BYE. C’était quoi, au final, quelques jours ? Pas grand-chose, c’est sûr. Mais pour d’autres, je sais que c’est sûrement moins simple. Alors c’est important de le savoir, c’est important d’en parler. HASHTAG JE SUIS VRAIMENT NULLE QUAND J’ESSAIE DE FAIRE DE LA PRÉVENTION ET D’ÊTRE SÉRIEUSE, mais ça me tenait à cœur de vous raconter cet épisode et de rassurer peut-être les futures mamans si elles passent par là.

 

Notre petite bulle tous les trois

 

1+1 = 3. J’ai envie de tuer les gens qui écrivent cette phrase, je vous jure. Pourtant, ça y’est, elle fait enfin écho dans ma tête. Notre petite vie s’organise autour de notre perruche. C’est simple, finalement. On réfléchit pas trop, on se laisse porter. On est comme ça avec Patrick, jamais vraiment dans l’organisation. En sortant de la maternité on est allés chez Vertbaudet pour acheter des biberons avec notre bébé parce que je pensais allaiter donc on en avait pas prévu. On a pas eu de poussette pendant plus d’une semaine. Le berceau était pas fini de monter quand j’étais à la maternité. J’avais pas fait mes prises de sang obligatoires le jour de l’accouchement. Ça ressemble à ça, l’organisation de notre vie : à rien. Mais on est si bien comme ça et il faut dire que ça fonctionne bien, puisque nous sommes tous les trois encore vivants.

 

On a volontairement décidé de continuer à mener notre vie sans nous mettre de barrières. Le samedi, deux jours après notre retour de la maternité, on a eu une dizaine de personnes à la maison le soir pour une raclette. Et puis, les semaines suivantes, je ne compte même pas le nombre d’invitations que nous avons lancées pour présenter Basile. Le nombre de courses que nous avons faites, le nombre de repas préparés (bon, t’as compris pourquoi j’aime autant la raclette…niveau préparation on est quand même pas mal), le nombre d’amis reçus à la maison. Bon, on manquait clairement d’heures de sommeil mais à l’échelle d’une vie, qu’est-ce que c’est ? Quedal, en fait. On avait juste envie d’être heureux et de partager ça avec nos proches. On s’est adaptés à notre bébé, bien sûr, il a toujours été notre priorité, mais à côté, nous sommes très vite allés au resto ou chez les copains en l’emmenant partout avec nous. C’était comme ça que nous imaginions la vie de parents. Je n’ai pas assez de recul pour le moment pour savoir si c’est la bonne méthode mais de toute façon, il n’y a pas de bonne méthode. Chacun trouve midi à sa porte, je crois que c’est le plus important à retenir. Certains nous disent « vous avez raison de l’emmener partout, c’est mieux de l’habituer ». D’autres nous diront « oh quand même vous n’allez pas emmener un si petit bout comme ça à la montagne ? ». Et bien, les gars, je vais vous dire, je sais pas si on a raison. Si on a tort. Je ne sais pas. On fait comme on a toujours fait : à l’instinct. On voit ce qui marche avec notre bébé, ce qui ne marche pas. Et on rectifie le tir, si jamais. On s’était toujours dit qu’on continuerait à bouger partout avec notre bébé. Aujourd’hui on est contents de pouvoir le faire parce que Basile s’adapte bien et se montre très paisible partout où on l’emmène. Mais voilà, si demain ce n’est plus le cas, et que la grande vadrouille ne lui convient plus, et bien on s’adaptera à lui. C’est comme ça qu’on est parents, nous. En faisant des erreurs, en faisant des tests, en ajustant. On ne sait pas toujours ce qui est bien ou mauvais pour son enfant, ce n’est pas toujours évident de faire le tri avec toutes les infos qu’on nous balance. Et puis, il ne parle pas, forcément, ça n’aide pas à toujours bien comprendre. Mais je pense qu’en tant que parents, on sait quand même reconnaître si notre bébé semble « épanoui » ou non. Et du moment que son bien-être est assuré, et bien, je pense que c’est la bonne méthode, peu importe celle qu’on choisit. (COUCOU LA PSYCHOLOGIE DE COMPTOIR DU DIMANCHE SOIR À 1H11 DU MATIN).

 

Mon corps, ce chantier

 

9 mois. 9 mois à regarder mon ventre s’arrondir, ma peau s’étendre, mes hanches s’élargir. 9 à mois à contempler avec amour et bienveillance ce temple qui abrite un petit trésor si précieux. 9 mois hors du temps, où je me laisse enfin le droit de m’assumer pleinement, de mettre en valeur mes nouveaux atouts, de montrer au monde entier, avec fierté, que je porte la vie.

 

Et puis un jour, le néant. Le vide. On tire un trait sur les 9 mois passés, on remballe les leggings de grossesse, on rentre à la maison à trois. On reprend sa vie où on l’avait laissée avant. Rien n’a vraiment changé au final. On est trois, oui. Mais rien n’a vraiment changé. On boit le même thé le matin, on regarde les mêmes émissions le soir, on dort dans les mêmes draps (bon, on dort moins…) et on a toujours le même ciel au-dessus de la tête.

 

Dans le miroir, pourtant, un corps étranger, un corps abîmé. Vous connaissez l’émission « On a échangé nos mamans ? ». Ba c’est un peu le même concept, avec ton corps, quoi. Au lieu de passer d’une famille stricte avec 5 enfants à Colmar à un foyer monoparental laxiste avec un enfant roi et un chien à Marseille, tu passes d’un corps de femme à un corps en chantier. Un corps de FERME (pardon, j’avais ce jeu de mots qui me trottait dans la tête). Tout est à reconstruire. Bon, selon la grossesse et selon l’accouchement que tu as eu, parfois il y a juste un bon coup de peinture pour rafraîchir, parfois il faut tout refaire du sol au plafond.

 

Je vais vous faire l’état des lieux de mon chantier à moi, en toute transparence. J’ai pris dix kilos pendant la grossesse, j’en ai perdu cinq pendant l’accouchement. Pas grand-chose, vous me direz. Non, en effet. C’est pas une histoire de kilos, en fait. C’est une histoire de vergetures, de peau flasque, de seins qui tombent, d’enveloppe corporelle que je ne reconnais plus, qui ne me correspond plus. Pourtant, chaque marque sur mon corps a son histoire. Je devrais en être fière. De ce corps qui a porté la vie pendant neuf mois, qui a construit au fil des mois un petit nid douillet pour faire grandir mon fils, qui a subi la douleur pour faire venir au monde un petit être. Mon corps, ce héros. Mais voilà, je ne l’aime pas, ce corps. Pour l’instant. Je ne vais pas en faire toute une histoire non plus. Il y a tellement d’autres choses plus importantes. J’accepte d’être un peu fâchée avec lui pour le moment, pour mieux me réconcilier plus tard. Ce n’est pas facile, c’est sûr. Mes anciens vêtements ne me vont plus, je m’habille pour me cacher et non pour me mettre en valeur, je me cache chez moi des yeux de Patrick car je ne veux pas me montrer sous ce jour-là. J’essaie de ne pas être trop dure avec moi-même mais je le suis, c’est comme ça. Ce corps que j’ai tant aimé pendant 9 mois, je le hais aujourd’hui. Ça me fait grincer des dents quand je prends ma douche ou quand je me regarde dans le miroir. Mais voilà, ce sont seulement quelques minutes par jour. Et puis, c’est seulement un épisode de ma vie. C’est pas grave. Je ne retrouverai peut-être jamais mon corps d’avant mais j’arriverai à perdre mes kilos de grossesse, à reprendre le sport, à retrouver une certaine harmonie. C’est une question de semaines, de mois, d’années, je ne sais pas. J’y arriverai, c’est tout ce que je me dis. On a le droit de ne pas s’aimer à un moment donné mais je pense qu’il ne faut surtout pas se laisser envahir par cette pensée. C’est ce que j’essaie de faire au quotidien. Voilà, ça me fait chier de plus rentrer un orteil dans mon jean préféré, mais sérieux, à l’échelle d’une vie, on s’en bat les couilles, non ? J’aime bien mettre les trucs à l’échelle de la vie pour me rendre compte à quel point on se lamente pour des choses ridicules. Moi la première, hein, clairement. Y a plus de plat du jour au resto et ma vie est foutue, y a une taille en rupture de stock chez Zara et je bouillonne de l’intérieur, y a ma box Internet qui bugue et j’ai envie de tout péter. Alors chaque fois, je replace les choses dans leur contexte et j’arrive à faire la part des choses. C’est ce que je fais avec mon corps, depuis bientôt deux mois. C’est long. Rien n’a changé. Je n’ai perdu aucun kilo de plus entre le lendemain de mon accouchement et aujourd’hui. C’est putain de long, ouais. J’attends de pouvoir reprendre le sport, j’attends de passer la période infernale caloriquement parlant des fêtes, j’attends 2020. Et en attendant, je camoufle mon chantier à grands coups de collants gainants, de robes larges et de gros pulls. J’admire les femmes qui s’acceptent comme elles sont, qu’elles fassent du 32, du 34, du 42 ou du 58. Vraiment, je les admire. Moi, je ne m’accepte pas. Et je pense qu’il faut aussi commencer à l’accepter, ça. On ne peut plus jamais parler de poids sans vexer personne. Des tas de gens se sentent visés dès qu’on dit qu’on aimerait perdre quelques kilos. Chacun son histoire, en fait. J’avais juste envie d’exprimer dans cette partie, mon ressenti à moi, après ma grossesse, à propos de mon propre corps. J’ai le droit d’être dure avec lui, c’est le mien.

 

Et puis, il n’y a pas que les kilos, en fait. On parle que de ça, tout le temps. « Mais dis-donc, t’as tout perdu toi ! ». Nouvelle phrase fétiche des gens. Stop parler du poids des autres tout le temps, s’il vous plaît. Je souris à chaque fois et je fais des blagues mais sérieux, ça me mine. Foutez la paix à mon corps, bordel. Oui, j’ai tout perdu. J’ai perdu deux étages au niveau des seins, j’ai perdu la fermeté de ma peau, j’ai perdu la tonicité de mon périnée, j’ai perdu le côté cosy de mon vagin, je me suis perdue moi-même, les gars. Il faut être prête à tout ça, aussi. J’ai vécu une grossesse formidable, un accouchement magique, mais les quelques jours après, c’était moins la joie. Rien d’insurmontable, non, comme toujours, mais des petites surprises auxquelles je ne m’étais pas forcément vraiment préparée. Les éraflures à vif sur les lèvres qui font pleurer de douleur dès que tu pisses (donc quinze fois par jour), les grosses douleurs de règles le temps que ton utérus se remette en place, les pertes de sang pendant plusieurs semaines, les hémorroïdes, les montées de lait et les seins affreusement douloureux, les migraines. Bref, tout un petit lot de cadeaux bien sympas. Une fois de plus, je ne me plains pas, franchement, c’est pas grand-chose et je n’aime pas me lamenter, je vous l’ai déjà dit. Ça fait partie des galères à gérer après l’accouchement, en plus de tout ce qu’il y a à gérer. En fait, tout ça, c’est pour vous dire : si vous aviez prévu de courir un marathon trois jours après votre accouchement, oubliez. Prenez le temps de vous reconstruire, à tous les niveaux, et de profiter de votre nouvelle petite vie.

 

Et aujourd’hui…

 

J’avais commencé à écrire cet article lorsque Basile avait 3 semaines. On est un mois plus tard, maintenant. Autant vous dire que niveau organisation, j’ai lâché prise. Ma maison est un peu plus en bordel qu’il y a deux mois, mes dossiers traînent plus longtemps sur mon bureau et mes cheveux sont probablement plus souvent gras aussi. Mais j’aimerais aussi rassurer les futures mamans : tout est gérable, il faut juste ne pas se mettre la pression. On dort un peu moins, c’est sûr, mais voilà, perso, je me suis mise au café, et je le vis bien. Cet article est déjà bien assez long alors bon, je crois qu’on peut mettre un point final dans pas longtemps, hein.

 

5145 mots pour 7 semaines d’amour, de sourires, de couches, de biberons, de doutes, de joies, de peines, d’engueulades, de câlins, de petits pieds tout mignons et de mini-chaussettes orphelines qui traînent dans la maison. Je suis heureuse, moi, mon chantier, mon bébé, mon Patrick et le reste du monde. Et de tout ce que je peux dire et ressentir au quotidien, je ne retiens que ça.

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